Pierre-Gaël Pasquiou
Zuko Carrasco : Il grimpe El Capitan à la force de ses bras
Dans la vallée de Yosemite, en octobre 2022, Zuko Carrasco réalisait l'impensable : gravir El Capitan sur 900 mètres à la seule force de ses bras. Si l'escalade de ce monolithe de granite est déjà une épreuve pour une personne en très bonne condition physique, le faire sans l'aide de ses jambes relève de l'exploit. Paraplégique depuis 8 ans, Zuko Carrasco a relevé ce défi comme symbole de la reconquête d'une autonomie perdue.
En 2015, alors que Zuko Carrasco était un guide de montagne professionnel en Équateur, il perd définitivement l'usage de ses jambes dans un accident. Zuko et un ami accompagnaient à cette époque un team-building pour un groupe d'employés d'une compagnie d'assurances. L'activité se déroulait sur un parcours de cordes installé dans des arbres à proximité de Quito, la capitale de l'Équateur. La dernière activité de la journée était un "trust fall", une manière de symboliser l'importance de la confiance, un exercice courant lors de ce genre d'événement d'entreprise. Le rôle de Zuko Carrasco était de sécuriser chaque participant à une corde avant de les laisser descendre dans le vide. Au moment venu pour lui de redescendre, après avoir vérifié et entendu une réponse qu'il croyait être une confirmation, Zuko Carrasco s'est lancé à son tour. Mais au lieu du soutien attendu de la corde, c'est la chute libre. Un arrivée brutale au sol qui le blesse à la moelle épinière au niveau des vertèbres C5 et C6, le laissant paraplégique.
Un tournant dans la vie du guide, le forçant à reconstruire son identité et à trouver de nouvelles façons de poursuivre sa passion pour le sport et l'aventure. La découverte du handcycle (vélo à main) est une révélation, il participe à des courses et entreprend même l'ascension de Kilimanjaro en Tanzanie avec un modèle modifié. Pour couronner le tout : il réalise un vol en parapente en partant du sommet du Cotopaxi, un volcan équatorien culminant à presque 6 000 mètres d'altitude.
En octobre 2020, lorsqu'il se lance dans l'escalade d'El Capitan, il est conscient que réaliser un tel exercice relève de l'exploit. À l'aide d'un système de poulies spécialement conçu, il entreprend l'ascension de ces 900 mètres, se hissant centimètre par centimètre, pour un total de presque 30 000 tractions.
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Chaque repétition, le soulevant d'environ 10 centimètres, représente une lutte acharnée contre la gravité et ses propres limites physiques. Il affronte la déshydratation, des ampoules douloureuses, et des moments de doutes. Son incapacité à transpirer correctement, liée à la paralysie de ses jambes, ajoute un risque de coup de chaleur aux dangers déjà bien présents. Pourtant, après une semaine d'efforts acharnés, il atteint le sommet.
Ce voyage vertical a été un défi physique mais aussi une confrontation contre des émotions intenses. Habitué à animer des conférences sur la motivation il raconte avoir puisé sa force dans le fait d'apprécier le moment présent, dans la contemplation de la beauté sous ses yeux et la satisfaction de chaque petite avancée.
Aujourd'hui, Zuko Carrasco envisage une traversée en handcycle de plus de 1 600 kilomètres à travers les Andes péruviennes, un périple qui promet un dénivelé vertigineux...
L'histoire de Zuko gagne une audience de plus en plus importante sur les réseaux sociaux, faisant de lui une source d'inspiration pour de nombreuses personnes confrontées à leurs propres défis. Sa détermination et sa capacité à transformer l'adversité en force captive désormais un public qui va bien au-delà de la communauté de sportive.