Madrid 4 Speed : l’escalade de vitesse se réinvente en grand format
Les compétitions d’escalade, surtout en vitesse, nous ont habitués à des formules millimétrées, réglées comme des montres suisses. Mais fin octobre 2024, Madrid a changé la donne avec son format quatre voies simultanées. Exit le duel classique, bienvenue dans un champ de bataille où les athlètes doivent composer avec trois autres grimpeurs en même temps. « C'était génial ! » nous résume l'Américaine Piper Kelly. Ici, on ne grimpe plus pour battre un adversaire en face, mais pour survivre dans un combat à plusieurs, en s’assurant une place parmi les deux meilleurs de chaque série. Le tout, sans run d’échauffement, juste un saut dans le feu de l’action.
Une pression unique : une nouvelle dynamique sur le mur
Dans ce format inédit, chaque départ est un gros défi mental. Les grimpeuses et grimpeurs savent qu’ils sont cernés, avec deux voies de chaque côté, créant un environnement où le moindre bruit, la moindre vibration peut devenir un piège. « C’est comme un 100 mètres où tu dois être parmi les meilleurs de ta série, » explique Lison Gautron, avec qui nous avons échangé et qui a hâte d'avoir l'occasion de tester ce format. Ludovico Fossali, l’Italien que nous avons également interrogé, partage cette impression : « Là, tu as les yeux rivés devant, mais t’as toujours quelqu’un dans ton champ de vision. C’est presque perturbant d’avoir des gens qui grimpent à gauche et à droite. » Le choix de la position n’est pas anodin, et se retrouver au milieu peut vite devenir un enfer pour celles et ceux qui n’ont pas les nerfs assez solides.
Une distribution des voies qui redistribue les cartes
Contrairement au format habituel où les grimpeurs sont positionnés en fonction de leur temps, ici, l’ordre des voies diffère. D’habitude, le meilleur grimpeur part à gauche et le dernier à droite. Mais à Madrid, l’ordre est un peu plus complexe : le premier part en milieu-gauche, le second en milieu-droit, le troisième sur la voie extérieure gauche et le quatrième sur l’extérieure droite. « Le premier a normalement l’avantage de partir à gauche, où il a moins de chances de voir ses concurrents et de faire un faux départ, » explique Lison Gautron. « Là, ils ont dû adapter, mais ce n’est pas évident pour tout le monde. » Cette répartition des voies ajoute une couche de stratégie et met les grimpeurs face à des repères nouveaux et déroutants.
Un relais qui galvanise les équipes
Si le format individuel à quatre voies a surpris, c’est le relais par équipes qui a vraiment marqué les esprits. Dans ce relais à deux, l’esprit d’équipe prend le pas sur l’individualisme souvent associé à la vitesse. « C’est un format qui a vraiment beaucoup de potentiel, » nous confie Ludovico, enthousiasmé par cette nouvelle dimension de la compétition. « Pour une fois, on peut décrocher une médaille pour l’équipe, pour notre pays. On grimpe ensemble, c’est motivant. »
« Pour une fois, on peut décrocher une médaille pour l’équipe, pour notre pays. On grimpe ensemble, c’est motivant. »
Ce relais a cependant révélé quelques limites organisationnelles. « Le départ du second grimpeur, ce n'était pas idéal, » explique Piper Kelly. « Il fallait regarder une lumière pour partir, et ce n'est pas forcément simple de te concentrer là-dessus. Un signal sonore, ce serait plus naturel, plus instinctif. » Malgré cette amélioration à envisager, le relais par équipes a laissé entrevoir de nouvelles possibilités pour l’escalade de vitesse. Cette épreuve collective pourrait bien devenir une référence dans le futur, notamment si elle rejoint un jour les Jeux Olympiques.
L’impact psychologique : un défi mental intense
Sur ce format quatre voies, l’impact psychologique est aussi fort que la tension physique. Dans cette épreuve, l’incertitude est omniprésente. « D’habitude, tu connais ton rival, tu connais ta position. Là, t’as trois personnes autour de toi, et tu dois ignorer ce qui se passe à côté pour rester concentré, » relate Ludovico Fossali. Ce chaos apparent oblige les compétiteurs à une concentration extrême, chaque détail de leur placement devenant une question de survie. « Être capable de grimper sans te laisser distraire, c’est crucial. La moindre erreur et tu peux te retrouver dernier, » ajoute Lison Gautron, pour qui le défi mental s’ajoute à l’effort physique.
« D’habitude, tu connais ton rival, tu connais ta position. Là, t’as trois personnes autour de toi, et tu dois ignorer ce qui se passe à côté pour rester concentré. »
Ce nouveau format oblige les grimpeuses et grimpeurs à adapter leur approche, ajoutant un niveau d’exigence supplémentaire dans la gestion du stress. Ce ne sont plus seulement des muscles d’acier et une précision irréprochable qui sont requis, mais également une capacité d’adaptation inébranlable. Ceux qui maîtrisent cet équilibre entre la concentration et le lâcher-prise se retrouvent avantagés, et la compétition n’en devient que plus féroce.
Chengdu 2025 : cap sur une consécration mondiale ?
Madrid 4 Speed a testé les limites de l’escalade de vitesse et a su séduire les grimpeurs et le public avec cette expérience inédite. Ce laboratoire grandeur nature pourrait bien devenir la nouvelle référence de la discipline, et Chengdu 2025 se profile comme la prochaine scène où ce format pourrait se consolider. Lison Gautron nous confie : « Si on garde ce format, ça pourrait vraiment rendre l’escalade de vitesse encore plus spectaculaire. » Les retours sont très majoritairement positifs et tous s’accordent sur un point : l’escalade de vitesse est prête à prendre ce nouveau virage.
« Si on garde ce format, ça pourrait vraiment rendre l’escalade de vitesse encore plus spectaculaire. »
Madrid a fait un pari audacieux, transformant ce qui était jusqu’ici une course individuelle en un combat stratégique à plusieurs. Cette dynamique nouvelle a apporté un souffle de renouveau, avec des athlètes ravis de vivre ce défi collectif et ce rythme effréné. Si Chengdu adopte cette formule, l’escalade de vitesse pourrait bien captiver un public de plus en plus large, prêt à vibrer pour ces compétitions où chaque millième de seconde compte.