top of page

En Australie les parkings des salles d’escalade se transforment en tables étoilées

Photo du rédacteur: Adrien BatailleAdrien Bataille

L’escalade, c’est le goût du défi. Mais jusqu’ici, pas celui des bonnes choses. Entre deux runs, on ne trouvait guère mieux qu’une barre de céréales oubliée au fond du sac ou une boisson énergétique au goût douteux. La récupération se faisait à l’arrache, à la va-vite, sans le moindre respect pour le palais.


Mais ça, c'est une page qui s'apprête à être définitivement tournée, enfin du moins en Australie. Des anciens de la gastronomie sérieuse, du genre à manier les dressages millimétrés et les cuissons de précision, se sont mis en tête de nourrir les grimpeurs autrement. Leur cuisine ? Des parkings. Leur clientèle ? Des grimpeurs qui découvrent qu’on peut enchaîner un bloc et un yakitori sans perdre en crédibilité.


Un choc des cultures ? Plutôt une évidence.


Up climbing food
© Up Climbing

De la haute gastronomie à la haute voltige


À Melbourne, la restauration est une affaire d’État, et le sport, une religion. Alors voir un ex-chef étoilé planter son barbecue devant une salle de bloc, c’est peut-être inattendu, mais pas illogique. Cam Tay-Yap, ancien de Amaru (trois toques au Good Food Guide, autant dire que le gigot d’agneau ne se tranche pas au hasard), est un habitué de La Roca Boulders. Depuis des années, il traînait avec les propriétaires, Les Ching et Des Ching, pour des barbecues improvisés sur le parking. Jusqu’au jour où ils ont décidé d’en faire un vrai concept.


C’est ainsi qu’est né Pebble, un pop-up culinaire où la carte change toutes les deux semaines, au gré des chefs invités. On y a déjà vu :


  • Mika Chae de Doju, qui a envoyé un agneau glacé au gochujang avec crème de tofu fumé et jus au café (oui, ça existe).

  • Jack Tsai, ex-Lee Ho Fook, qui a sorti un porc char siu à la rhubarbe pour le Nouvel An lunaire.

  • John Demetrios, ancien de Vue de Monde, qui a pris en main la partie desserts avec une précision chirurgicale.


Mais si Cam Tay-Yap a choisi l’option cuisine nomade et grand spectacle, Nico Bassand, lui, joue sur un autre tableau : celui du gérant qui n’a pas pu s’empêcher de remettre la main à la pâte.


Nico Bassand : du fourneau au mur d’escalade (et retour au fourneau)


Nico Bassand est Français, et ça se sent dans son rapport à la gastronomie. En débarquant en Australie, il s’est fait un nom en cuisine dans l’un des restaurants italiens les plus respectés de Melbourne, avant de raccrocher le tablier… ou presque. Aujourd’hui, il est le manager de Up Climbing, une salle de bloc à Balaclava. Son plan initial ? Oublier les fourneaux et se consacrer à l’escalade. Mais on ne désapprend pas à être chef.


Dès son arrivée, il repère un vide : côté assiette, c’est morne plaine. Les grimpeurs méritent mieux que des snacks sous cellophane, mais personne n’a les moyens d’installer une vraie cuisine. Plutôt que de bricoler un espace mal fichu, il joue la carte de la débrouille inspirée : il installe un barbecue japonais de 1,5 mètre en plein air, alimente le tout au charbon de bois et lance Ember by Nico.


Son terrain de jeu, c’est la brochette, mais version tour du monde express. Une semaine, il grille du yakitori japonais ; la suivante, il enchaîne sur un détour vietnamien avec bo la lot (bœuf en feuille de bétel), nem nuong (saucisse de porc) et cuisses de poulet à la citronnelle. Le tout grillé sur du charbon binchotan, cette braise qui ne fume pas mais qui envoie du feu.


Le résultat ? Une file d’attente qui mélange grimpeurs entre deux runs, abonnés du la salle de fitness voisine, et quelques foodies qui ont flairé le bon plan.


Et en France, ça donnerait quoi ?


On ne va pas se mentir : la France a un rapport à la cuisine qui frôle l’obsession. Un chef qui grille des brochettes entre deux crash pads ? Pas encore vu. Certes, des salles comme Arkose ont compris l’intérêt de soigner leur offre – avec des burgers maison et des bières artisanales bien senties. Mais un ex-chef étoilé qui envoie de la gastronomie de rue pour grimpeurs, en mode feu de camp amélioré ? Ça, on attend toujours.


Et pourtant, l’idée a tout pour fonctionner. On a les salles, on a les produits, on a les clients. Il ne manque qu’un chef prêt à troquer sa brigade contre un barbecue en plein air. Imaginez : un ancien de Septime qui envoie des légumes rôtis après une séance de bloc. Un transfuge de la haute gastronomie qui préfère les flammes à la nappe blanche et redonne du sens à la cuisine en revenant à l’essentiel.


En Australie, ils l’ont fait. En France, qui sera le premier à allumer le feu ?

DEUX FOIS PAR MOIS,
LE MEILLEUR DE LA GRIMPE

deco logo

Merci pour ton inscription !

PLUS DE GRIMPE

bottom of page