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  • À Keqiao, une victoire en trompe-l’œil pour Annie Sanders

    La Coupe du monde féminine de bloc 2025 s’est ouverte à Keqiao avec le succès incontestable d’Annie Sanders. Pourtant, cette victoire en apparence limpide laisse flotter une drôle d’impression : l’Américaine l’a emporté, certes, mais sans avoir à croiser le fer avec ses principales adversaires. Oriane Bertone, quant à elle, n’a pas su saisir l’occasion en or qui se présentait. Décryptage d’un week-end chinois où les absentes ont toujours raison et où les grandes attentes françaises restent en suspens. © IFSC Annie Sanders, reine en solitaire Victoire nette, sans bavure, mais victoire solitaire. À seulement 17 ans, Annie Sanders signe à Keqiao un doublé après Séoul en fin d’année dernière. Sa grimpe, millimétrée, efficace, n’a laissé aucun doute quant à son talent précoce. Pourtant, difficile d’ignorer que ce triomphe prend place dans un décor étrangement vide . Privée de confrontation directe avec Janja Garnbret et Natalia Grossman, les deux figures tutélaires du circuit, Sanders a triomphé sans adversité directe. Depuis Hachioji 2018, jamais une étape mondiale n’avait vu l’absence simultanée de ces deux géantes. L’Américaine se retrouve donc reine d’un jour mais devra vite prouver qu’elle sait aussi régner quand toutes les prétendantes au trône seront présentes. Oriane Bertone : une occasion ratée de décrocher l'or ? Après la désillusion olympique à Paris 2024 , elle avait signé un retour flamboyant en décrochant le titre national à Anse . Keqiao s’annonçait donc comme la suite logique d’une renaissance sportive annoncée. Cette deuxième place chinoise n’a rien de honteux : Bertone connaît bien l’argent, habituée à cette médaille depuis Meiringen et Salt Lake City 2021, puis Séoul et Salt Lake City 2023, avant de décrocher enfin l’or à Prague la même année. Mais ce podium-là laisse tout de même un arrière-goût amer : sans Garnbret ni Grossman, la voie semblait dégagée. Elle avait tout pour elle sauf, peut-être, la tranquillité d’esprit. © IFSC Car à seulement 20 ans, Oriane Bertone doit composer avec une pression immense, celle d’un public français avide de voir enfin l’étoile montante devenir étoile tout court. Sa place dans l’élite mondiale n’est plus à prouver, mais le dernier cap psychologique reste encore à franchir. Pour Oriane, il s’agirait désormais d’éviter que les attentes se transforment en un poids trop lourd à porter. La France entière espère que la Réunionnaise finira bientôt par prendre définitivement la couronne qu’elle mérite. Les absentes : maîtresses du jeu sans même grimper Dans cette étrange partie d’échecs verticale, Janja Garnbret semble avoir trouvé la meilleure parade : ne pas jouer. Cette saison, la Slovène a choisi avec soin ses batailles, limitant drastiquement ses apparitions à Innsbruck, Koper et surtout aux Mondiaux de Séoul. Une stratégie où l’absence se fait présence, où ne pas grimper devient une manière subtile d’imposer sa supériorité, refusant aux autres le privilège de l’affronter.  Janja démontre ainsi que dominer un sport, c’est aussi savoir quand ne pas y participer. Format à huit : une finale en suspens (et pas que sur les prises) Cette étape chinoise testait une petite révolution : huit finalistes au lieu de six habituellement. L’idée pouvait séduire, mais la pratique divise fortement. « Chaque erreur devient fatale, le stress est palpable même à travers l’écran » , lâchait un internaute lors du live YouTube. Un autre répliquait aussitôt : « Découvrir de nouvelles têtes, pourquoi pas, mais ça disperse un peu trop l’attention. » Le format devra donc être affiné avant d’être adopté durablement, mais l’expérimentation montre déjà la volonté d’un sport de se renouveler, quitte à parfois brouiller les repères des spectateurs… et des athlètes. © IFSC Diffusion restreinte : un blocage malvenu Autre (gros) caillou dans la chaussure de l’IFSC : la diffusion européenne limitée à Discovery+ et Eurosport . Les fans nord-américains profitent gratuitement de YouTube, alors qu’en Europe, les amateurs d'escalade doivent payer pour suivre les compétitions. Cette stratégie commerciale agace profondément au moment précis où l’escalade, encore toute fraîchement olympique, devrait au contraire s’ouvrir davantage au grand public. Si l’escalade veut vraiment prendre son envol populaire, il faudrait peut-être arrêter de couper le cordon avec les spectateurs potentiels. Wujiang : changement de décor, mêmes doutes La prochaine étape se jouera la semaine prochaine à Wujiang sur un autre terrain, celui de la difficulté et de la vitesse. Annie Sanders comme Oriane Bertone devront montrer leur polyvalence pour rester dans la course au général. Mais avec l’absence persistante de Janja Garnbret et Natalia Grossman, l’incertitude planera toujours sur une saison devenue fragmentée. Difficile dès lors d’y voir clair, comme si le calendrier sportif devenait lui-même un bloc à déchiffrer. © IFSC Ce que Keqiao raconte vraiment En fin de compte, Keqiao révèle un premier classement mais cette étape chinoise met surtout en lumière un sport en pleine transformation, où grimper bien ne suffit plus. Annie Sanders devra confirmer en présence des absentes, Oriane Bertone devra vaincre ses démons intérieurs, et l’IFSC devra vite résoudre ses paradoxes médiatiques. Cette saison 2025, passionnante et complexe, sera donc riche d’enseignements. Chaque compétition comptera double, chaque absence sera pesée, chaque présence décisive. Et rien, absolument rien, ne sera joué d’avance - pas même, visiblement, les règles du jeu elles-mêmes. Les résultats détaillés et classement de cette étape sont disponibles ici . Et pour retrouver le calendrier complet de cette coupe du monde IFSC 2025 c'est par là .

  • Keqiao 2025 : la Coupe du Monde d’escalade inaugure sa saison chinoise avec ambition et panache

    Pour la deuxième année consécutive, le Keqiao Yangshan Climbing Center ouvre le bal des Coupes du Monde IFSC . Si la tradition veut que les grands rendez-vous de la grimpe mondiale oscillent entre continuité et renouvellement, Keqiao 2025 ne fait pas exception à la règle. Cette première étape marque ainsi le 404e rendez-vous de l’histoire du circuit mondial, dont la 154e épreuve de bloc, inscrivant au passage la Chine comme troisième nation la plus accueillante derrière la France et l’Italie. © Nakajima Kazushige/IFSC Absence notable, cartes rebattues L’absence de la Slovène Janja Garnbret , double championne olympique et vainqueure incontestée ici l’an passé, redistribue d’emblée les cartes. Une situation dont pourraient tirer profit l’Italienne Camilla Moroni et la Chinoise Luo Zhilu, respectivement médaillées d’argent et de bronze en 2024, désormais libérées du poids écrasant de la concurrence de Garnbret. Chez les hommes, la stabilité du podium se démarque avec un trio de choc : Narasaki Tomoa, figure tutélaire du bloc international, accompagné du prodige olympique japonais Anraku Sorato , médaillé d'argent à Paris 2024, et du tenace grimpeur belge Hannes Van Duysen, tous revenus pour en découdre. Entre poids lourds et nouvelles figures La compétition rassemble un contingent conséquent de 132 athlètes venus de 29 pays, dont les délégations japonaise (12 grimpeurs), allemande (11) et américaine (10) constituent les principaux blocs concurrentiels face à la délégation chinoise, forte de 13 représentants. Les vétérans nippons Miho Nonaka et Narasaki Tomoa attirent particulièrement l’attention : Nonaka prend part à sa 52e compétition internationale, tandis que Narasaki atteint le chiffre remarquable de 54 participations en Coupe du Monde de bloc. Les jeunes pousses à surveiller Cette édition est aussi marquée par l’entrée en scène de plusieurs athlètes débutants au niveau mondial . Chez les femmes, la Britannique Emma Edwards et l’Américaine Ella Fisher font leurs grands débuts. Côté masculin, le Canadien Dylan Smith, l’Italien Niccolò Antony Salvatore ou encore l’Israélien Oren Prihed tenteront d’imposer leur style face aux vétérans expérimentés. Confirmation ou révélation ? Face à ces nouvelles dynamiques, quelques visages familiers ambitionnent clairement la plus haute marche . Oriane Bertone (France), Miho Nonaka (Japon) et Annie Sanders (USA) côté féminin, ainsi que Mejdi Schalck (France), Toby Roberts (GBR) et les habitués japonais Anraku Sorato, Sugimoto Rei et bien sûr Narasaki Tomoa tenteront d’affirmer leur domination passée. Programme et enjeux Le lancement officiel aura lieu dès demain, vendredi 18 avril, avec les qualifications féminines dès 3h00 (pour la France), suivies par les hommes à partir de 10h00. Ce premier acte donnera très probablement le ton d’une saison où les enjeux sportifs et symboliques seront à la hauteur des attentes des passionnés d’escalade du monde entier. Pour consulter le détail du programme et comme suivre tout ça en live, rendez-vous ici . La compétition de Keqiao promet d’être un premier chapitre riche en rebondissements et en enseignements, tant physiques qu’intellectuels.  Que la grimpe commence.

  • Résultats Coupe du Monde de bloc femmes – Keqiao 2025

    Les 18 et 19 avril 2025 , la Coupe du Monde féminine de bloc reprenait ses droits à Keqiao , en Chine. Et si la victoire finale d’Annie Sanders semble sans appel, l’étape chinoise aura surtout marqué les esprits par son scénario inattendu : Oriane Bertone, dominatrice en demi-finale, laisse filer la victoire, comme prise d’un vertige dont elle peine à sortir. © IFSC Finale Femmes – Bloc (Keqiao 2025) Annie Sanders (USA)  – 54,7 points Oriane Bertone (FRA)  – 44,9 points Erin McNeice (GBR)  – 44,8 points Mao Nakamura (JPN)  – 44,4 points Miho Nonaka (JPN)  – 44,1 points Melody Sekikawa (JPN)  – 29,6 points Chaehyun Seo (KOR)  – 19,6 points Oceania Mackenzie (AUS)  – 9,9 points En finale, la tension était évidemment palpable : Annie Sanders a su parfaitement gérer l’enjeu, remportant une victoire solide mais à la saveur particulière, en l’absence de plusieurs grandes rivales du circuit. Oriane Bertone, quant à elle, semble avoir été rattrapée par la pression , passant tout près d’un succès pourtant annoncé après des demi-finales presque parfaites. Le podium, incroyablement serré derrière Annie Sanders, s’est joué à quelques dixièmes de points seulement, confirmant la densité croissante du circuit féminin. Demi-finales Femmes – Bloc (Keqiao 2025) Oriane Bertone (FRA)  – 84,7 points Oceania Mackenzie (AUS)  – 69,5 points Annie Sanders (USA)  – 69,3 points Melody Sekikawa (JPN)  – 69,3 points Miho Nonaka (JPN)  – 54,7 points Mao Nakamura (JPN)  – 45 points Erin McNeice (GBR)  – 44,9 points Chaehyun Seo (KOR)  – 39,4 points La demi-finale avait pourtant été largement dominée par Oriane Bertone, qui semblait alors sur la voie royale pour démarrer idéalement sa saison. Mais en finale, tout s’est inversé pour la Française. Oceania Mackenzie, elle aussi très performante lors de la demi-finale, a finalement totalement raté sa finale, terminant à une surprenante huitième place. © IFSC Absences notables à Keqiao : le poids invisible des absentes Difficile enfin d’évoquer ces résultats sans rappeler que plusieurs athlètes phares du bloc mondial avaient fait l’impasse sur Keqiao : Janja Garnbret, Natalia Grossman (opérée récemment du genou) ou encore Brooke Raboutou . Ces absences stratégiques ont clairement modifié la dynamique sportive , rendant cette première étape à la fois riche en opportunités et source de frustrations pour celles qui n'ont pas su saisir pleinement leur chance. Prochain rendez-vous : Wujiang redistribue les cartes La prochaine étape aura lieu à Wujiang (Chine), du 25 au 27 avril 2025, avec un changement complet de discipline : les grimpeuses se retrouveront cette fois sur la difficulté et la vitesse. Un changement de décor radical qui pourrait rebattre totalement les cartes d’une saison décidément imprévisible. Pour une analyse complète des enjeux sportifs, stratégiques et médiatiques de Keqiao 2025, retrouvez notre article approfondi ici . Et pour consulter le calendrier complet de cette coupe du monde IFSC 2025 c'est ici .

  • Boycott massif chez Touchstone : la révolte des adhérents américains

    Après les grèves des ouvreurs, les bras de fer juridiques et les négociations bloquées, le conflit social chez Touchstone Climbing prend un tournant inédit.  Cette fois-ci, ce ne sont plus seulement les salariés qui se mobilisent, mais les abonnés eux-mêmes, ces grimpeuses et grimpeurs réguliers qui font tourner économiquement les salles californiennes. En lançant un vaste boycott de leur propre réseau, ils viennent de transformer radicalement la dynamique du conflit. © Touchstone Workers United Un boycott inédit lancé par les membres Ces dernières semaines, des centaines d’abonnés, parmi lesquels figurent des grimpeurs historiques, ont décidé de suspendre ou de résilier leur abonnement à Touchstone Climbing. Cette mobilisation n’est pas anodine : elle frappe directement au cœur du modèle économique d’une des entreprises les plus importantes du secteur, en pleine expansion sur la côte ouest des États-Unis. « Ce n’est pas une décision facile , explique une grimpeuse fidèle. On aime nos salles, nos habitudes, et cette communauté qu’on a construite au fil du temps. Mais on ne peut plus cautionner une entreprise qui refuse d'écouter ses employés et maintient délibérément une stratégie antisyndicale . » Ce mouvement de boycott intervient après l’échec répété des tentatives de médiation entre Touchstone Workers United, le syndicat représentant les salariés, et la direction de l'entreprise.  Face à ce blocage, ce sont désormais les clients qui ont choisi d'agir pour faire pression sur la direction. Les revendications claires des abonnés Les abonnés en boycott n'agissent pas seulement par solidarité symbolique. Leur action est structurée autour de revendications précises : La reprise immédiate et sincère des négociations avec Touchstone Workers United, bloquées depuis des mois. L’arrêt définitif des pratiques antisyndicales dénoncées par les salariés. Le rétablissement des avantages sociaux récemment supprimés par Touchstone. Une amélioration rapide des conditions de travail, notamment sur la sécurité, la charge de travail et la rémunération des ouvreurs. Quand la confiance se fissure Cette crise traduit surtout une rupture profonde entre Touchstone et sa communauté. Depuis plusieurs années, les salles californiennes se sont développées autour d’un discours axé sur l'éthique, la convivialité et l'esprit communautaire. Mais à mesure que les affaires grossissent, ces valeurs semblent de plus en plus éloignées de la réalité vécue par les salariés. Aujourd'hui, le boycott révèle que la confiance s’est fissurée , et que les adhérents ne sont plus disposés à fermer les yeux sur les contradictions de l'entreprise. En frappant directement au portefeuille, ils rappellent que les clients ont le pouvoir de peser sur les décisions stratégiques des réseaux de salles. Ce phénomène dépasse d’ailleurs le cas Touchstone.  À travers les États-Unis et même ailleurs, comme en France récemment chez Climbing District ou Climb Up Aubervilliers , les crises internes liées aux conditions de travail dans les salles d’escalade se multiplient. L’escalade indoor devient ainsi progressivement un nouveau front dans les conflits sociaux contemporains. Touchstone face à un choix décisif Concrètement, pour Touchstone, l’enjeu est désormais stratégique.  L’entreprise peut-elle continuer à ignorer les revendications combinées de ses salariés et de ses propres clients ? Pour l’instant, la direction reste silencieuse sur la question du boycott, semblant miser sur l’essoufflement rapide de la mobilisation. Mais les abonnés ne comptent pas relâcher la pression.  Des initiatives en ligne se multiplient, entre pétitions, appels au don pour soutenir les travailleurs en grève, et campagnes de communication visant à sensibiliser largement sur les réseaux sociaux. Vers un modèle d’escalade indoor plus responsable ? Au-delà de ce conflit localisé, cette mobilisation soulève une question essentielle pour l'avenir de l’escalade indoor, en pleine explosion :  quel modèle économique et social veut-on privilégier dans les années à venir ? L’exemple de Touchstone montre clairement que les grimpeurs, désormais sensibilisés à ces enjeux, pourraient bien être prêts à privilégier les salles qui respectent réellement leur discours éthique. Face à cette évolution, tous les grands réseaux, aux États-Unis comme en Europe, devront tôt ou tard se poser cette même question : peut-on durablement développer la grimpe indoor sans placer les conditions de travail des salariés au cœur du projet ? Le boycott massif chez Touchstone pourrait finalement devenir le point de départ d'une prise de conscience collective dans toute l'industrie.  Un avertissement sérieux pour tous les acteurs qui pensaient pouvoir ignorer durablement ces enjeux sociaux, pourtant bien présents derrière chaque volume, chaque prise, chaque voie ouverte.

  • Climb Up Aubervilliers : grève sur prises

    Grève inédite chez Climb Up : une vingtaine de salariés de la salle d’Aubervilliers ont cessé le travail pour dénoncer des conditions qu’ils jugent dégradées. En cause : six licenciements controversés, une direction locale perçue comme hors-sol, et une absence de dialogue avec le siège. Le mouvement s’inscrit dans un climat tendu pour le secteur, en France comme à l’étranger. © Vertige Media Ce matin, devant la salle que Climb Up revendique comme la plus grande d’Europe, le calme inhabituel a quelque chose de paradoxal. Aucun cliquetis métallique, pas de rires nerveux devant un bloc rebelle, seulement le silence déterminé d'une vingtaine de salariés : ouvreurs, moniteurs, hôtes d'accueil. Sur le bitume glacé d'Aubervilliers, l'ambiance n'est pas à la conquête verticale mais à l'affirmation horizontale d'un collectif . Vertige Media était là pour comprendre les ressorts intimes d’un conflit qui raconte bien plus qu’une simple histoire de prises. « Cette grève, c'est parce qu'on n'a pas été écoutés » La phrase, prononcée par un ouvreur en CDI à Aubervilliers, pourrait résumer à elle seule le malaise. Mais c'est précisément parce que derrière elle s’empilent les récits, les griefs, et les demandes sans réponse, qu’elle résonne si fort. « On a essayé. On a tenté des discussions. Et la direction, notamment le directeur de la salle, a fermé toutes les portes. » À ses côtés, une hôtesse d’accueil en CDD abonde, voix fatiguée mais ferme : « On est traités comme des exécutants, pas comme des personnes. On demande juste de la considération. » Cette notion revient comme un leitmotiv chez les grévistes : malgré les multiples tentatives pour alerter sur les conditions de travail, les mails envoyés et les dialogues réclamés, rien ne bouge . Ou plutôt si : les portes se ferment une à une. © Vertige Media Des genoux, un siège, et une dignité Dans cette grève où les visages racontent autant que les mots, une salariée à l'accueil raconte son histoire comme une synthèse amère : « Ils m'ont flingué les genoux. J'ai dû pleurer, faire des recours, passer des IRM pour espérer juste avoir un siège. » Le siège, symbole dérisoire et essentiel, ne lui est arrivé que trop tard. La solution proposée par son directeur ? Une rupture conventionnelle : « On m'a toujours dit : si ton patron te propose une rupture co, c'est qu'il veut te dégager. » Elle quittera la salle la semaine suivante, mais sa présence ce matin-là témoigne d’un soutien sans faille à ceux qui restent. 42,20 euros : le prix d'une confiance brisée Ce qui a mis le feu aux poudres ? Six licenciements soudains, motivés par des faits que la direction qualifie de « vols », mais que les salariés contestent fermement . Selon plusieurs témoignages recueillis par Vertige Media, ces accusations porteraient en réalité sur des gestes commerciaux jugés anodins par les employés, comme des boissons offertes à la clientèle et non enregistrées dans le système. Une sanction vécue comme disproportionnée par les grévistes interrogés : « Certains étaient là depuis longtemps. Ils ont tout donné pour Climb Up. On les remercie comme ça, pour 42 euros. » Cette gestion brutale, vécue comme une violence gratuite, a mis le feu à des poudres déjà bien sèches. © Vertige Media Un management hors-sol Talal Darwish, à la tête de la salle depuis décembre 2024, cristallise les tensions. Ancien responsable chez Kiloutou, il ne vient pas de l'escalade, ce qui en soi ne poserait pas de problème si cela ne nourrissait pas une forme d’incompréhension radicale avec ses équipes . Un moniteur le souligne avec ironie : « Ça fait deux mois qu'on se dit bonjour, mais il ne sait même pas qui je suis. Il ne sait même pas faire un assurage en cinq temps. » Sollicité sur place par Vertige Media, Talal Darwish a refusé de répondre à nos questions . Un contraste avec la démarche de Marc Paoli, directeur de Climb Up Cergy, présent ce matin-là. Lui parle volontiers, tente une médiation : « À Cergy, il y a un dialogue constant. Ce n’est pas un modèle vertical, chaque salle a ses réalités. » Une manière de dire en creux qu’à Aubervilliers, le dialogue n’a pas pris racine. L'Amérique en miroir Hasard du calendrier ou symptôme global ? La même semaine, aux États-Unis, les ouvreurs de Touchstone Climbing, le principal réseau américain, déclenchaient eux aussi une grève sur des motifs très similaires : conditions de travail, salaires, reconnaissance. Comme à Aubervilliers, ils pointent du doigt un secteur en pleine croissance mais qui oublie parfois l’humain en chemin . « Ce n’est pas juste chez nous, confirme un moniteur. C’est profond. On sent que c'est général. » Le parallèle dit quelque chose de l’évolution d’un secteur qui s’est construit sur une promesse sportive, mais flirte désormais dangereusement avec la surchauffe économique. La rentabilité en tension : la racine du problème ? Marc Paoli ne le cache pas : économiquement, le contexte est délicat . Dettes héritées du Covid, concurrence accrue, marché saturé : « On est très endettés, la rentabilité n'est pas là. On doit faire très attention. » Cette précarité économique n’excuse rien, mais elle explique sans doute en partie le durcissement des méthodes, la pression commerciale accrue, comme la priorité mise sur le fun climbing, très lucratif mais aussi très critiqué pour les questions de sécurité : « On encadre des groupes d’enfants sans vraie formation. C’est dangereux, mais ça rapporte gros. » © Vertige Media Et maintenant, quel dialogue ? Si les grévistes tiennent à clarifier que ce n’est pas la guerre mais un appel urgent au dialogue , ils affirment aussi que leur détermination est entière. Ils réclament une reconnaissance simple, humaine, un traitement digne des conditions de travail, sans grandiloquence mais sans naïveté non plus. « On ne veut pas cramer la boîte. On veut juste qu’elle fonctionne mieux. Qu’on arrête de nous infantiliser. » Le mot « infantiliser » revient d’ailleurs souvent dans leurs propos, et sur les pancartes, comme pour dire que le conflit est moins économique ou salarial que profondément humain . En réclamant une discussion directe avec la direction du groupe, les grévistes veulent sortir d’une impasse devenue intenable : « Tant qu'on n’aura pas un vrai dialogue adulte, on ne s’arrêtera pas. » À Aubervilliers, ce matin-là, la parole a enfin été libérée. Il reste désormais à voir si elle sera écoutée, ou à défaut, si elle trouvera écho ailleurs. Car au-delà d’un conflit local, c’est la question même du modèle de croissance accélérée des salles d’escalade qui se pose ici . Les murs continuent de pousser, les hommes et les femmes qui les font vivre, eux, ont décidé de ne plus se taire.

  • Marco Scolaris reconduit à la présidence de l’IFSC : l’escalade prolonge son règne

    Sans surprise mais non sans débat, Marco Scolaris décroche un ultime mandat à la tête de l’IFSC. Réélu à l’issue d’un scrutin serré, le président historique a désormais quatre ans pour ancrer définitivement l’escalade dans la cour des grands sports olympiques. © IFSC Le 12 avril dernier à Larnaca (Chypre), les coulisses feutrées de la XXIIe Assemblée Générale de l’ IFSC avaient des allures de déjà-vu.  Après une campagne discrète mais tendue, Marco Scolaris, président emblématique et inamovible depuis 2007, a été reconduit pour quatre années supplémentaires à la tête de la fédération internationale. Face à lui, un challenger crédible et structuré, Tijl Smitz, président de l’IFSC Europe, dont la candidature portait implicitement un appel au renouvellement. Mais l’appel n’a pas suffi : avec 48 voix contre 35 pour son adversaire, Marco Scolaris repart donc pour un dernier tour de piste.  Si cette victoire nette valide une continuité rassurante, elle rappelle également que le règne du président italien n’est plus aussi incontestable qu’auparavant. L’escalade sportive, engagée dans un défi historique pour s’ancrer définitivement aux Jeux Olympiques , vient peut-être de choisir la prudence plutôt que l’audace. Reste à savoir si elle ne risque pas de perdre, dans ce choix confortable, une opportunité unique de renouveler profondément ses ambitions. Il faut dire que le président italien a des arguments solides à faire valoir.  Sous sa présidence, l’escalade sportive a confirmé sa présence aux Jeux Olympiques, avec un programme ambitieux à Los Angeles en 2028. Là-bas, la discipline atteindra enfin son format rêvé : fini le combiné imposé, place désormais à trois médailles distinctes ( vitesse, bloc, difficulté ). Cerise sur le gâteau : l’IFSC obtient même huit quotas supplémentaires , portant à 76 le nombre total de grimpeurs olympiques contre 68 prévus pour Paris. De quoi justifier largement le maintien d’un président qui sait visiblement très bien parler olympisme aux oreilles du CIO . Le vieux lion tient encore la corde Avec près de deux décennies aux commandes, Marco Scolaris connaît les rouages comme personne . Sa réélection confirme une évidence : l’IFSC préfère miser sur l’expérience plutôt que sur un pari neuf. La campagne de l’Italien a frappé juste en jouant sur les attentes concrètes du milieu : un calendrier international mieux maîtrisé, un investissement réel pour la para-escalade , et une place olympique enfin gravée dans le marbre . Le tout enrobé dans un discours rassurant sur le « bien-être des athlètes », indispensable caution morale face à des grimpeuses et grimpeurs qui réclament de plus en plus fort d’être entendus. 57,83 % des voix, c’est confortable, mais pas triomphal. Derrière la victoire, perce la nécessité pour Marco Scolaris de ne pas seulement gérer ses acquis, mais de réinventer un peu l’avenir s’il veut laisser une trace plus nette qu’un simple record de longévité. Un casting sans grande surprise, mais avec une nouveauté américaine Côté vice-présidences, les élections ont reconduit en majorité des visages familiers : Naomi Cleary (Australie), Pierre You (France) et Toru Kobinata (Japon) restent en place. Seule petite révolution : l’arrivée remarquée de l’Américaine Anne-Worley Moelter. Un changement qui rappelle subtilement l’importance stratégique de l’Amérique du Nord pour l’avenir olympique de la grimpe . Exit Joachim Driessen (Pays-Bas) et Jan Bloudek (République tchèque), qui n’ont pas réussi à convaincre. Pour les représentants continentaux, là aussi pas de tremblement de terre : Christopher Naude pour l’Afrique, Li Guowei en Asie (au nez d’Anthony Seah, pourtant crédible challenger), Burghilda Beste en Europe, Stephane David en Océanie, et René Sepulveda pour la zone Pan-Américaine. Un board globalisé mais sans véritables outsiders, fidèle à l’esprit IFSC. Au-delà des personnes, c’est aussi sur les projets annoncés que ce dernier mandat sera jugé. Parmi les ambitions affichées, certaines tranchent plus franchement que d’autres : création prévue pour 2027 d’une équipe internationale d’athlètes réfugiés , un nouveau logo pour moderniser l’image de l’IFSC, et surtout un engagement écologique accéléré avec un objectif clair : réduire de moitié les émissions carbone opérationnelles d’ici 2028 , soit deux ans avant l’échéance initialement fixée . Moins symbolique mais stratégiquement clé : l’Assemblée Générale a aussi validé l’intégration de deux nouvelles fédérations nationales, le Congo et l’Irak , portant à 101 membres  le nombre total de pays représentés à l’IFSC. Un signe clair que sous la gouvernance Scolaris, la fédé continue à étendre méthodiquement son terrain de jeu géographique. Virage numérique et nouvelle frontière Autre nouveauté passée sous les radars mais potentiellement majeure : l’IFSC officialise désormais l’eClimbing et l’ePara Climbing comme disciplines officielles . Derrière ce jargon très eSport se cache une réalité stratégique assumée : coller aux tendances sportives mondiales pour élargir son audience et se positionner habilement dans la course à l’intégration au Comité International Paralympique (IPC). Une manœuvre bien sentie. Enfin, la révélation finale : Riyad accueillera l’Assemblée Générale 2026. Yasmin Gahtani, visage féminin fort du sport saoudien, a présenté une candidature habilement validée par les délégués. Un choix qui, à l’heure où l’IFSC brandit les valeurs d’inclusion et de progrès, ne manquera pas de susciter débats et grincements de dents en coulisse. Marco Scolaris repart donc pour un tour. L’homme est à l’image de l’escalade olympique elle-même : installé mais pas tout à fait assouvi, solide mais toujours sous tension. Reste à savoir si son dernier mandat sera celui du changement ou de la prudence, celui de l’innovation ou de l’immobilisme confortable.

  • Assemblée générale FFME 2025 : Hausse des licences et équilibre démocratique

    Réunie à Toulouse les 5 et 6 avril derniers, l’Assemblée générale annuelle de la FFME a acté une augmentation de 10 euros du tarif des licences .  Sous les apparences d'une décision classique, ce vote révèle en réalité un exercice délicat d'équilibre démocratique. Entre transmission imparfaite des informations en interne, mandats territoriaux parfois rigides, et une fédération tiraillée entre compétitivité et accessibilité, retour sur un week-end où les subtilités démocratiques se sont invitées à la table des débats. Une augmentation sous contrainte démocratique Le vote est tombé : 55,35 % pour, 44,65 % contre.  Un résultat serré, qui dit beaucoup plus qu'une simple hésitation face à une hausse tarifaire. Au cœur du sujet, une mécanique démocratique complexe qui s’est heurtée à une communication interne probablement insuffisamment adaptée aux réalités du terrain. Car si la FFME avait effectivement annoncé dès janvier une possible augmentation à ses comités territoriaux et ligues, l’information – contenue dans des documents souvent techniques et denses – n’a manifestement pas atteint tous les destinataires avec la clarté nécessaire.  Résultat : un nombre important de représentants, pris dans les mailles d’un tissu associatif largement bénévole et déjà saturé d’informations, est arrivé à l’AG avec des mandats contraints, décidés par des clubs n’ayant pas toujours pris la mesure complète des enjeux. Ce dilemme démocratique a été résumé très précisément par le président de la fédération, Alain Carrière, lors de notre entretien : « Certains délégués m’ont confié avoir voté contre parce que leur comité territorial s’était positionné ainsi, tout en précisant adhérer pleinement à la stratégie proposée par notre équipe. » En clair : il ne s’agit pas ici d’une absence d’informations, mais bien de leur mise en forme et de leur transmission qui ont péché.  Face à un réseau de bénévoles déjà surchargés, peut-être aurait-il fallu adapter la communication autour de cette question cruciale : la rendre plus digeste, plus directe, plus pédagogique. « À chacun sa performance » : ambiguïtés stratégiques derrière une formule séduisante Autre point central abordé lors de cette AG : le nouveau « sprint stratégique » de la fédération pour les quatre années à venir, structuré autour d’un slogan subtilement équivoque : « À chacun sa performance, à chacun son terrain de jeu ». © FFME Cette formule apparemment simple révèle en fait un défi stratégique délicat : comment faire cohabiter sous un même toit institutionnel l’élite sportive et la pratique dite « pour tous », traditionnellement plus proche de valeurs prônées par des fédérations historiquement concurrentes, comme la FSGT ? À travers cette référence plurielle à la « performance », la FFME esquisse une tentative subtile de réconciliation conceptuelle, cherchant à faire accepter une performance plus diffuse, collective et inclusive.  Un exercice intellectuel délicat, mais potentiellement porteur si la fédération parvient à clarifier suffisamment son propos. Économie fédérale : changement de paradigme et nouvelle direction marketing Cette AG était également l’occasion d’entériner un virage économique assumé vers davantage de partenariats privés. Ce tournant s’accompagne concrètement de l’arrivée récente d’un nouveau directeur marketing et événementiel, symbole d'une mutation profonde dans la culture organisationnelle de la FFME. Cependant, cette transition n’est pas sans contradictions internes. Alain Carrière relève ainsi que certains représentants souhaitent à la fois attirer des partenaires privés et réduire l’investissement sur le haut niveau, sans toujours percevoir que les partenaires privés visent précisément à associer leur image au prestige des compétitions. Le chemin vers cette nouvelle économie fédérale promet donc d'être pavé d’ambiguïtés qu’il faudra soigneusement lever dans les années à venir. Le poids encombrant de l’IFSC : frein ou levier économique ? Dans cette dynamique de mutation économique, la relation avec l’IFSC (Fédération internationale d’escalade sportive) s’est imposée comme un sujet central.  Clairement, cette dernière est aujourd’hui perçue par la FFME comme un véritable frein au développement commercial, notamment en raison des contraintes très fortes imposées aux organisateurs locaux sur la visibilité commerciale des partenaires nationaux . Alain Carrière en parle sans détour : « Nous sommes extrêmement cadrés par ce que nous impose l’IFSC. Le bénéfice économique réel pour la fédération nationale est finalement divisé par deux, comme on l’a vu avec la récente annulation de la Coupe du monde à Briançon . » Cette tension révèle une confrontation entre deux visions opposées : un modèle français associatif traditionnel face à un modèle international de plus en plus tourné vers l'organisation privée des grands événements sportifs. Numérique et reconnaissance humaine : des avancées réelles pour le terrain Face à ces grands débats stratégiques, l’Assemblée générale a aussi apporté des réponses concrètes et attendues par les licenciés, notamment par l’arrivée effective des outils numériques fédéraux tels que myFFME, myCOMPET et FFME.SHOP.  Ces solutions représentent un vrai soulagement administratif pour un tissu associatif souvent débordé. © FFME Par ailleurs, l'AG n'a pas oublié de célébrer les acteurs emblématiques du monde fédéral, comme Pierre-Henri Paillasson ou les frères Bassa et Mickaël Mawem. Ces hommages rappellent judicieusement que derrière les grandes stratégies, c’est avant tout une aventure humaine qui est à l’œuvre. Le défi démocratique : une performance à réussir absolument En définitive, cette AG 2025 révèle surtout l’urgence d’un travail démocratique approfondi.  La FFME devra apprendre à mieux adapter ses communications stratégiques aux réalités du terrain associatif, pour permettre à chacun de comprendre et de participer pleinement aux décisions cruciales qui façonnent son avenir. Le véritable enjeu fédéral est désormais de transformer ces subtilités démocratiques, économiques et conceptuelles en un projet partagé par tous.  Un défi collectif et intellectuel que la fédération devra impérativement réussir, pour éviter qu’à la prochaine assemblée générale, la démocratie fédérale ne se retrouve une nouvelle fois en position d’équilibre précaire.

  • Brno 2027 : l’Europe refait surface, sans tambour ni drapeau

    Avec 53,25 % des voix, Brno accueillera les Championnats du monde d'escalade 2027. Un choix tout sauf anodin, qui marque moins un retour nostalgique vers les racines européennes du sport qu’un subtil rééquilibrage diplomatique face au tropisme asiatique des compétitions internationales. © David Pillet Europe-Asie : pourquoi Brno l’a emporté sur Pékin À 53,25 %, la victoire de Brno face à Pékin est nette, mais sans emphase.  Juste assez pour qu'on se demande pourquoi la ville tchèque, deuxième cité du pays, l'a emporté sur la capitale chinoise, pourtant rodée aux grands événements. La Chine était un choix évident : infrastructure prête, financement solide, expérience des circuits mondiaux. Mais précisément, cette évidence a peut-être fini par jouer contre elle. Depuis quelques années, l’escalade internationale penche fortement vers l’Asie.  Après les JO de Tokyo et bientôt les Championnats du monde de Séoul en 2025, le circuit IFSC semblait inexorablement attiré par l’Orient. Face à ce mouvement, Brno apparaît moins comme une rupture que comme un contrepoids subtil mais efficace. Car Brno n’est ni Chamonix ni Innsbruck : aucune nostalgie alpine ici. Ce choix est plus médian, plus politique.  Une ville européenne capable d’accueillir sans saturer, de porter un événement mondial sans céder à la démesure. En clair, Brno est l’Europe raisonnable, une sorte de solution diplomatique dans un contexte sportif devenu géopolitique. Brno, ou l’art tchèque de l’équilibre discret Avec sa toute nouvelle Arena Brno , multifonctionnelle et subtilement high-tech, la Tchéquie propose exactement ce que le circuit international attend aujourd’hui : une infrastructure impeccable, sobre, efficace, sans excès scénographique.  Le pays n’est pas novice en la matière : Prague accueille déjà régulièrement des étapes de la Coupe du monde, preuve que les Tchèques savent organiser sans éblouir inutilement. © Arena Brno Brno n’a pas gagné par hasard : elle a été choisie pour sa capacité à rassurer, tout simplement.  Elle offre une promesse réaliste, une organisation fiable, et une vision claire du rôle qu’elle peut jouer sur l’échiquier sportif mondial. Derrière cette discrétion assumée, il y a une vraie lucidité : en 2027, on ne choisit plus une ville pour éblouir, mais pour garantir. Ce que dit Brno, finalement, c’est que l’Europe n’a pas vraiment reconquis son influence. Elle la réaffirme sans tambour ni drapeau.  Le choix de cette ville tchèque est un moyen intelligent de rappeler qu’entre les nouvelles puissances asiatiques et les vieilles places fortes européennes, il existe encore une troisième voie. Ni tradition poussiéreuse, ni modernité tape-à-l’œil, mais quelque chose de moins visible, de moins attendu. Et peut-être, justement, de plus durable.

  • Découvrez les athlètes des Olympic Qualifier Series 2024 en escalade sportive

    Dans l'univers de l'escalade sportive, l'anticipation monte à l'approche des Olympic Qualifier Series 2024, un jalon crucial sur la route vers les Jeux Olympiques de Paris 2024 . Cet événement emblématique mettra en vedette plus de 160 grimpeurs et grimpeuses d'exception, tous unis par un même objectif : se qualifier pour les JO et réaliser leur rêve olympique. Les épreuves, prévues pour se dérouler entre mai et juin 2024 , sont promises à être des moments phares pour les enthousiastes et les professionnels de l'escalade olympique. Crédit : David Pillet La Fédération internationale d'escalade sportive (IFSC) orchestre ce défi avec précision, distribuant les places convoitées : dix pour chacune des spécialités de l'escalade , à savoir le bloc, la difficulté, et la vitesse. Ces disciplines testeront non seulement la force et l'agilité des compétiteurs mais aussi leur détermination et leur stratégie face aux défis. Les Olympic Qualifier Series offrent une scène mondiale où les athlètes des quatre coins du globe convergent vers Shanghai et Budapest pour partager leur passion de l'escalade et leur esprit de compétition. Shanghai, du 16 au 19 mai, et Budapest, du 20 au 23 juin, se transformeront en épicentres de l'escalade, accueillant ces talents dans des lieux spectaculaires. En plus de l'escalade, cet événement multidisciplinaire célèbrera d'autres sports urbains tels que le BMX freestyle, le breaking, et le skateboard, enrichissant ainsi l'expérience olympique. On vous partage la liste des athlètes qui brilleront lors des Olympic Qualifier Series 2024 et qui pourraient se qualifier pour l'escalade sportive aux Jeux Olympiques de Paris 2024 : Grimpeuses confirmées pour participer aux Olympic Qualifier Series 2024 - Vitesse femmes Australie Grace CROWLEY Chine Di NIU Shaoqin ZHANG Yafei ZHOU Shengyan WANG Corée du Sud Jimin JEONG Hanareum SUNG Heeju NOH Équateur Andrea ROJAS Espagne Leslie Adriana ROMERO PÉREZ Carla MARTÍNEZ VIDAL France Capucine VIGLIONE Victoire ANDRIER Manon LEBON Lison GAUTRON Allemagne Franziska RITTER Indonésie Rajiah SALLSABILLAH Nurul IQAMAH Narda Mutia AMANDA Iran Mahya DARABIAN Italie Beatrice COLLI Giulia RANDI Japon Ai TAKEUCHI Fumika KAWAKAMI Karin HAYASHI Natsumi HAYASHI Kazakhstan Tamara ULZHABAYEVA Pologne Natalia KALUCKA Aleksandra KALUCKA Patrycja CHUDZIAK Anna BROZEK Afrique du Sud Tegwen OATES Grimpeurs confirmés pour participer aux Olympic Qualifier Series 2024 - Vitesse hommes Australie Hayden BARTON Chine Peng WU Xinshang WANG Liang ZHANG Jianguo LONG Équateur Carlos GRANJA Isaac ESTEVEZ Espagne Erik NOYA CARDONA France Pierre REBREYEND Guillaume MORO Allemagne Leander CARMANNS Sebastian LUCKE Indonésie Veddriq LEONARDO Kiromal KATIBIN Aspar ASPAR Raharjati NURSAMSA Iran Reza ALIPOUR SHENAZANDIFARD Italie Ludovico FOSSALI Gian Luca ZODDA Alessandro BOULOS Japon Jun YASUKAWA Ryo OMASA Kazakhstan Rishat KHAIBULLIN Amir MAIMURATOV Corée du Sud Euncheol SHIN Yongjun JUNG Pologne Marcin DZIENSKI Ukraine Yaroslav TKACH Hryhorii ILCHYSHYN États-Unis John BROSLER Zach HAMMER Noah BRATSCHI Grimpeuses confirmées pour participer aux Olympic Qualifier Series 2024 - Bloc et Difficulté femmes Argentine Valentina AGUADO Australie Maya STASIUK Autriche Franziska STERRER Belgique Chloe CAULIER Bulgarie Aleksandra TOTKOVA Canada Alannah YIP Chine Luo ZHILU Corée du Sud Chaehyun SEO Jain KIM Yejoo SEO Sol SA République Tchèque Eliska ADAMOVSKA Michaela SMETANOVA France Hélène JANICOT Manon HILY Fanny GIBERT Zélia AVEZOU Allemagne Hannah MEUL Lucia DÖRFFEL Roxana WIENAND Sandra HOPFENSITZ Grande-Bretagne Molly THOMPSON-SMITH Erin MCNIECE Iran Elnaz REKABI Israël Ayala KEREM Noa SHIRAN Italie Laura ROGORA Camilla MORONI Giorgia TESIO Japon Miho NONAKA Futaba ITO Nonoha KUME Ryu NAKAGAWA Pays-Bas Lynn VAN DER MEER Slovénie Vita LUKAN Mia KRAMPL Sara COPAR Lucka RAKOVEC Serbie Stasa GEJO Suisse Petra KLINGLER Islande Svana BJARNASON États-Unis Brooke RABOUTOU Anastasia SANDERS Kyra CONDIE Kylie CULLEN Ukraine Levgeniia KAZBEKOVA Afrique du Sud Tegwen OATES Grimpeurs confirmés pour participer aux Olympic Qualifier Series 2024 - Bloc et Difficulté hommes Autriche Nicolai UZNIK Jan-Luca POSCH Stefan SCHERZ Australie Dylan PARKS Belgique Hannes VAN DUYSEN Simon LORENZI Nicolas COLLIN Bulgarie Nikolay RUSEV Canada Sean MCCOLL Oscar BAUDRAND République Tchèque Adam ONDRA Martin STRANIK Chine Yufei PAN Espagne Alberto GINÉS LÓPEZ France Mejdi SCHALCK Sam AVEZOU Paul JENFT Mickael MAWEM Allemagne Alexander MEGOS Yannick FLOHÉ Yannick NAGEL Grande-Bretagne Hamish MCARTHUR Maximilian MILNE Jack MACDOUGALL James POPE Hongrie Nimród Sebestyén TUSNÁDY Indonésie Ravianto RAMADHAN Raviandi RAMADHAN Israël Nimrod MARCUS Alex KHAZANOV Yuval SHEMLA Geva LEVIN Italie Stefano GHISOLFI Filip SCHENK Marcello BOMBARDI Giorgio TOMATIS Corée du Sud Dohyun LEE Jongwon CHON Yunchan SONG Lettonie Edvards GRUZITIS Slovénie Luka POTOCAR Anze PEHARC Martin BERGANT Zan LOVENJAK SUDAR Espagne Alberto GINÉS LÓPEZ Suède Hannes PUMAN Suisse Sascha LEHMANN Jonas UTELLI Afrique du Sud Christopher COSSER

  • Jeux Olympiques LA28 : l’escalade s’offre une vue sur l’océan à Long Beach

    Exit les salles aseptisées aux faux airs de hangars industriels.  En 2028, à Los Angeles, l’escalade olympique pose ses valises à Long Beach, face au Pacifique, avec promesse de sunsets instagrammables à l’infini.  De quoi donner aux athlètes une bonne raison de tomber, ne serait-ce que pour admirer la vue. L’info, lâchée par l'IFSC avec son enthousiasme olympique habituel, confirme le spot provisoire du Convention Center Lot comme arène officielle de la grimpe. Trois disciplines olympiques — Difficulté, bloc et vitesse — auront droit à leur scène perso , le tout adossé à un décor naturel qui ressemble à s’y méprendre à une pub pour une marque de surf californienne. « Une vue spectaculaire sur l’océan »,  claironne l'IFSC. Traduction : les stories Instagram de juillet 2028 auront toutes la même couleur pastel, et tant pis pour ceux qui préfèrent le béton gris. Il faut croire que le Comité olympique a définitivement basculé en mode West Coast. Après le show XXL de la clôture parisienne (souvenez-vous, Billie Eilish, les Red Hot et le grand Snoop himself en maître de cérémonie), c’est désormais l’esprit surf-skate et chill californien qui infuse jusque dans les choix sportifs.  L’escalade, en quête perpétuelle de reconnaissance, s’offre ainsi une dose supplémentaire de hype en s’associant à l’image légendaire de Long Beach, berceau du gangsta rap et temple des sports nautiques. Mais au-delà du décor, LA28 offre surtout une montée en gamme bienvenue à l’escalade. Trois épreuves distinctes (exit les combinés discutables), 76 athlètes au lieu des 68 de Paris 2024 , et enfin, pour la première fois dans l’histoire des Jeux, la para-escalade officiellement invitée à la fête . De quoi renforcer encore davantage le statut d’un sport qui rêve toujours de devenir plus qu’une simple parenthèse verticale dans l’olympisme. Bref, à Los Angeles, la grimpe muscle son jeu autant qu’elle soigne sa mise en scène. On imagine déjà Snoop Dogg, roi autoproclamé de Long Beach, venir squatter les gradins, lunettes noires vissées sur le nez, en train de commenter avec une désinvolture contagieuse la chute malheureuse d’un Adam Ondra trop distrait par la beauté du cadre. Parce qu’entre un crux délicat et le spectacle d’un dauphin passant au loin, le dilemme pourrait être cruel. Rendez-vous donc dans trois ans pour vérifier si les embruns salés auront un effet apaisant sur les nerfs des grimpeuses et grimpeurs olympiques.  Quelque chose nous dit que non, et c’est tant mieux.

  • Mathis Dumas : quand la montagne accouche d'une story

    Depuis qu’on l’a vu emmener le YouTubeur Inoxtag sur le toit du monde, Mathis Dumas est devenu le guide de haute montagne le plus connu de France. Pourtant, l’ascension au sommet du jeune Ardéchois a été progressive et méticuleusement préparée. Portrait d’un gars sûr. © Mathis Dumas C’est qu’il se cognerait presque la tête en rentrant. Quand il débarque, Mathis Dumas doit presque se plier en deux pour pénétrer dans ce sous-sol exigu du 5ème arrondissement. L’ironie est savoureuse : lui, l e guide de haute-montagne qui gravit l’Everest se retrouve coincé dans une cave. Pas vraiment son milieu naturel mais que voulez-vous, ici, c’est Paris. Et les interviews s’organisent dans des espaces aussi grands qu’une cabine de téléphérique. Ce soir, Mathis a quitté la Haute-Savoie pour se rendre à une soirée en l’honneur de Zag, son sponsor, une marque de ski dont les planches multicolores tapissent le mur de la boutique éphémère. Casquette vissée sur la tête, le trentenaire est aussi là pour serrer quelques paluches et peut-être même signer des autographes. «  Jamais je n’aurais pensé qu’un film sur la montagne puisse toucher autant de gens. Maintenant, c’est gravé pour l’éternité et je pense sincèrement que dans 20 ans, on en parlera encore » Depuis qu’il a guidé Inoxtag au sommet de l’Himalaya, Mathis Dumas a tout simplement changé de dimension. Second rôle de Kaizen , le documentaire sur la montagne aux 43 millions de vues sur YouTube, il est devenu le guide de haute-montagne le plus médiatisé du pays. Profitant de l’incroyable buzz, il survole alors les plateaux et les émissions de podcast pour répéter à l’envi son parcours ainsi que les coulisses du film. Désormais, Mathis Dumas possède le statut d’un véritable influenceur qui dépasse largement le cercle des amateurs d'alpinisme. 700 000 abonnés sur Instagram , 200 000 autres sur une chaîne YouTube  qu’il a créée il y a seulement six mois. À se demander si la casquette, c’est pour le style ou la tranquillité dans les rues de la capitale. « En vrai, je le vis bien , pose la nouvelle vedette. Quand les gens m’arrêtent dans la rue, c’est toujours pour me féliciter donc c’est super agréable. » Selon lui, en plus d’avoir fait un carton, Kaizen a vraiment conquis le grand public. « Étant donné la portée du travail d’” Inox ”, je savais que le truc pouvait marcher , continue-t-il. Mais jamais je n’aurais pensé qu’un film sur la montagne puisse toucher autant de gens. Maintenant, c’est gravé pour l’éternité et je pense sincèrement que dans 20 ans, on en parlera encore. » Zen restons zen Mathis Dumas assure que Kaizen a même ravi la caution des professionnels de la montagne. Des esprits pourtant très sceptiques à l’annonce du projet par Inoxtag sur sa chaîne Youtube, le 6 avril 2024 . « Je m’en souviens, c’était fou , rembobine le guide. Ça a d’abord fait les titres de la presse spécialisée puis ensuite tout le monde en a parlé.  » Pour les guides, les amateurs de montagne ou les commentateurs du milieu de l’alpinisme, le projet d'Inoxtag traduisait ce qu’ils appellent « une surenchère de la montagne  » . Pour eux, qu’un Youtubeur aussi influent fasse l’Everest participe forcément à la kermesse que sont devenues les expéditions sur le toit du monde. Mathis Dumas l’admet, il était un des premiers à critiquer l’initiative de son futur pote. « Je ne le connaissais pas, je ne connaissais d’ailleurs aucun YouTubeur à l’époque. Donc j’étais aussi extrêmement sceptique.  » Quand on lui propose de participer au film, le guide réfléchira longtemps, de peur de se retrouver dans un véritable bourbier. « Le déclic, c’est quand je me suis dit que si je ne le faisais pas, quelqu’un d’autre allait le faire à ma place , explique-t-il.   Et comme Inox me garantissait une grande liberté pour le guider mais aussi pour placer mon regard sur le film, je me suis dit que j’avais là une grande chance de faire valoir ma vision de la montagne . »  « Personne n’y croyait. Inès, il a ses codes de mec qui vient des jeux vidéo, son accent de banlieusard, son enthousiasme… rien qui aille avec le milieu très discret des guides de haute montagne  » Cette vision, il l’a chevillée au corps depuis qu’il a décidé d’être guide. Pour lui, la montagne en général et l'alpinisme en particulier souffrent de la course aux sommets emblématiques. Alors, «   il faut montrer qu’il y autre chose que le Mont-Blanc et l’Everest ». Pour ce faire, Mathis Dumas va pousser son ami à se préparer et à se filmer sur des pics différents de celui de 8849 mètres. Et c’est précisément ce choix qui finira par convaincre les montagnards, les vrais. En vérité, la réception de Kaizen a selon lui, connu trois phases. La première concerne l’annonce du projet, très critiquée. La deuxième survient au moment où Inoxtag met en ligne la vidéo de son ascension du Mont-Blanc, à l’été 2023  ( celle où Mathis Dumas apparaît pour la première fois, ndlr ). Selon ce dernier, «  c’est cette vidéo qui a rassuré beaucoup de gens  ». Et la troisième fait référence à la sortie du documentaire « qui a été plutôt bien reçu ». Aujourd’hui, certaines critiques persistent, comme celle de l’alpiniste et photographe Pascal Tournaire dans L'Équipe qui trouve le rendu final « très égocentré  » et compare l’ascension sous oxygène de l’Everest à « un tour de France en vélo électrique » . « Pascal, je le connais très bien, il habite à 500m de chez moi , répond Mathis Dumas. Je comprends sa critique, on en a beaucoup parlé. Après, elle visait surtout ce que l’Everest est devenu. Nous, on a jamais revendiqué une quelconque performance ». Jeux vidéos, esprit de cordée et Kaizen 2 Mathis Dumas traverse l’après-Kaizen comme le franchissement d’une arête : le pied sûr, les sens en alerte. «   À un moment donné, il a fallu arrêter la promo , lâche-t-il. Notre objectif avait été atteint et on sentait que nos interlocuteurs voulaient nous mettre à la faute. » Alors, le guide bascule dans une autre vie, gonflé par la notoriété et les nouveaux projets. Du film, il restera son amitié avec Inoxtag, de son vrai nom Inès Benazzouz , qui crève l’écran, 2h durant. « J’appelle ça l’esprit de cordée », résume Mathis Dumas. Soit un lien unique qui se forge entre deux alpinistes reliés par une même corde. Une complicité que les deux partenaires ne se sont pas gênés d’éprouver à nouveau. Le 11 avril dernier, Inès et Mathis sont repartis en montagne dans les Alpes pour gravir l’Aiguille Verte . Un sommet emblématique du massif du Mont-Blanc. « Rien à voir avec la surenchère de la montagne donc , glisse Mathis Dumas. Ce sera moins ronflant que l’Everest, mais plus technique.  » La morning routine de Mathis © Zag L’expédition débouchera sur une sorte de Kaizen 2 . « Le K2 quoi », plaisante Mathis Dumas. Le genre de projet qui est complètement aligné avec sa vision de la montagne. Et qui va permettre au guide de dévoiler le vrai niveau de son « frérot ». « Il faut savoir qu’Inès est très chaud , confie-t-il.  C’est un mec déterminé, rigoureux mais aussi extrêmement doué. Il percute super vite. En trois séances d’escalade, il faisait du 6a en tête. Il lui suffisait d’une seule explication pour réaliser des manip’ de cordes compliquées et de quelques indices pour qu’il sache expliquer parfaitement ce qu’est un sérac ou une rimaye sur un plateau télé.  » C’est peut-être ce que Mathis Dumas aime le plus dans ce genre de projets : emmener avec lui une personne a priori étrangère à l’alpinisme et en faire un amoureux de la montagne. « Au départ, personne n’y croyait. Inès, il a ses codes de mec qui vient des jeux vidéo, son accent de banlieusard, son enthousiasme… rien qui aille avec le milieu très discret des guides de haute montagne . C ’est aussi pour ça que Kaizen a été critiqué. Parce que ce monde de la montagne est encore très fermé vis-à-vis de personnalités comme celle d’Inès. Alors que moi, ça m’attire. » Avant d’ajouter : « Bon, ça vient peut-être aussi de mon propre parcours ». La mort aux trousses Mathis Dumas a grandi en Ardèche, à 3h de route des Alpes. Au départ, rien ne prédestinait le jeune garçon à cheminer sur les sentiers. Élève médiocre, il commence à décrocher lentement mais sûrement du milieu scolaire quand son père décide de faire une intervention. «  Il m’a sérieusement demandé de réfléchir à ce que j’aimais faire parce que pour lui, j’allais tout droit au carton  », glisse le trentenaire aujourd’hui. Alors le paternel ne lâche pas son fils qui lui, cherche le « concret » qu’il ne trouve pas dans ses cours de collège. Après d'innombrables recherches pour trouver un établissement qui va bien, la famille porte son choix sur le lycée des métiers de la montagne à Saint-Michel de Maurienne, en Savoie. Là-bas, Mathis part passer un bac pro en maintenance industrielle dédiée aux remontées mécaniques. Un pari. « J’adorais le ski, donc la montagne ça m’allait bien. Et la maintenance mécanique pour moi, c’était très concret  », explique-t-il. Sauf que le jeune Mathis part tout seul. « Et franchement le milieu n'est pas facile. Ça parle pas trop, c’est un peu fermé » continue-t-il. Même difficulté deux ans plus tard lorsque l’étudiant va s’installer dans la vallée voisine, à Chamonix, pour poursuivre un BTS. « C’est toujours un univers super particulier. Tout le monde se connaît dans les vallées. Les mecs ont fait du ski ensemble toute leur enfance. Tu ne déboules pas comme ça. Je me rappelle des premiers stages que j’ai fait à l’Aiguille du Midi, les types disaient : “Dumas ? Attends, c’est le fils à qui ?  » Aujourd’hui, il en est convaincu, ce parcours en solitaire a construit en grande partie sa carrière professionnelle. « Il a fallu se montrer deux fois plus rigoureux, deux fois plus exemplaire, explique-t-il. Dans le travail, mais aussi dans la vie, en société. Quand tu n'es pas d'ici, tu sens que t’es attendu. Donc je n’avais pas le droit à l’erreur. Il fallait être parfait. » À ce jour, après plus de 15 ans de présence dans la vallée, Mathis Dumas ne se sent toujours pas chez lui. « À Chamonix, les gens sont généralement de passage. Les trois quarts sont des étrangers ultra-riches. Tout est hors de prix. Il faut savoir que les loyers et les chalets sont plus chers au mètre carré qu’à Paris.  » À 18 ans, le jeune adolescent galère pour se payer du matos, un forfait, à manger… Mais d’une, le métier commence à rentrer et deux, il sait qu’il a fait le bon choix : la montagne est définitivement son environnement naturel. Alors Mathis Dumas enchaîne les courses, s’amourache de l'escalade sur glace ( qu’il pratiquera à haut-niveau en catégorie jeune, ndlr ) et caresse l’ambition de devenir guide de haute-montagne.  « La montagne, c’est toujours un univers super particulier. Tout le monde se connaît dans les vallées. Les mecs ont fait du ski ensemble toute leur enfance. Tu ne déboules pas comme ça. Je me rappelle des premiers stages que j’ai fait à l’Aiguille du Midi, les types disaient : “Dumas ? Attends, c’est le fils à qui ?  » La préparation à l’examen probatoire du diplôme d'État de guide de haute montagne exige ce qu’on appelle « une liste de courses ». Dit autrement, une série de sommets que le candidat doit prouver avoir atteint. À 19 ans, Mathis Dumas est fin prêt. «  À cet âge-là, on se sent invincibles, poursuit-il.   Et un jour, avec un pote qui passait aussi l’examen, on décide de faire une course ensemble. Au taquet. Arrivés près du sommet, sur une arête débonnaire, je décide de le prendre en photo. Et il a glissé. » Ce dernier chute d’une centaine de mètres. Mathis pense alors qu’il vient d’assister à la mort. Quelques heures plus tard, les secouristes repèrent et récupèrent le corps de son ami qui s’en sortira miraculeusement indemne. « Sauf que moi j’ai vrillé , lâche Dumas. J’y pensais toutes les nuits. J’avais beau savoir que beaucoup d’alpinistes disparaissaient dans leurs ascensions, c’était la première fois que je voyais de mes yeux que la montagne pouvait te tuer. » L’épisode marque un tournant. Si Mathis passe bien son diplôme de guide, il goûte moins à l’engagement et à la prise de risque. Le jeune guide se déporte vers une activité, plus safe  mais qui changera définitivement sa carrière : la photo. Suivez le guide Difficile de présenter Mathis Dumas en 2025. Guide de haute montagne ? Photographe extrême ? Réalisateur de films ? Influenceur ? Sans doute un peu tout ça à la fois. Désormais bien installé dans la vallée de Chamonix et en couple avec la quadruple championne du monde de snowboard, Marion Haerty , le jeune homme de 32 ans doit encore parfaire son équilibre . « Bon après, c’est assez simple hein , tempère-t-il sur son tabouret haut. Quand il fait beau, je suis dehors. Et quand il fait un temps pourri, je suis devant l’ordi.  » Depuis Kaizen , Mathis Dumas avoue qu’il a du mal à gérer les sollicitations. Il y a les clients qui le veulent comme guide, mais aussi des sponsors, des projets, des collab’... Pour l’instant, l’homme multidimensionnel se concentre surtout sur ses forces : son côté créatif qui embrasse très bien ses facultés de guide. « Après l’accident, je me suis dit que la photo ferait une bonne plus-value à mon activité , souligne-t-il. J’avais abandonné mes ambitions d'alpiniste. Les clients aimaient bien ça et visuellement ça fonctionne très bien. » Mathis se sert alors de son activité de photographe comme d’une vitrine à celle de guide. Il est d’ailleurs le premier à le faire dans la vallée. Et forcément, casser les codes ça fait parfois grincer des dents… « C’est clair que je ne me suis pas fait que des amis au début , confirme-t-il. Culturellement, le milieu des guides de haute montagne est très réservé, très humble .   Donner à voir en images, qui plus sur Instagram, leur jardin secret, ils ont pas kiffé. Et puis je me souviens que pendant mes études, un prof m’avait engueulé parce que je vendrais des journées plus chères que lui.  » À l’époque, le milieu ne sait même pas vraiment ce dont il s’agit. « Pour la petite histoire, rembobine Mathis, quand on passait devant le bureau des guides pour emmener des clients en montagne, les mecs pensaient qu’on était juste des guides touristiques. Et puis un jour, il y eu un accident et ils ont capté. Là, ils se sont dit : "Mais attendez, vous emmenez vraiment des gens en montagne en fait?!” ». Peu à peu, la médiatisation de la montagne sur les réseaux devient de plus en plus acceptée. Mathis Dumas a sans doute été un des pionniers mais aujourd’hui toute une génération de pro dépoussière l’image du guide de haute montagne qui serait forcément vieux et barbu . Les Benjamin Védrines , ou Charles Dubouloz médiatisent aussi beaucoup leur profession sur les réseaux sociaux. Mathis Dumas poursuit : « Le syndicat national des guides de montagne m’a même invité à donner une conférence consacrée aux réseaux sociaux et à l’influence. C’est bien la preuve que les choses bougent ». Quoi qu’il en soit, le guide-influenceur en profite et compte bien mettre à profit la palette de ses compétences pour montrer tout ce que l’évasion en montagne peut générer en termes de sensation. « Avec le nouveau matériel de plus en plus léger, tu peux combiner le vélo, le parapente, l’escalade, l’alpinisme… les aventures sont infinies , renchérit-t-il. Même chose avec le matos de prod, je me suis mis au drone. C’est incroyable.  » En guise de première production sur sa chaîne YouTube, Mathis Dumas a posté Out of Frame . L’histoire derrière la capture d’une photo de montagne spéciale, et toute l’organisation que cela suscite. Le film a déjà dépassé le million de vues. « C’est le propre de ce que je veux raconter , explique-t-il. Les coulisses de mon métier dans des endroits qui sont les plus beaux du monde. » La nouvelle star des guides tient d'ailleurs à le souligner : il ne s’est jamais mis en avant dans son travail, la montagne passe avant tout. « D’ailleurs, je devais même pas me retrouver dans Kaizen à la base !  », sourit-il. Et puis soudain du haut d’un sommet, c’est 43 millions de personnes qui vous contemplent. Tous propos recueillis par Matthieu Amaré, sauf mentions.

  • Jeux Olympiques 2028 : l’escalade décroche enfin ses trois médailles olympiques

    Jusqu’ici, aux Jeux Olympiques, l’escalade ressemblait à une cohabitation forcée entre trois disciplines qui n’avaient jamais vraiment rêvé de vivre ensemble. Après un combiné discutable à Tokyo et un semi-combiné à Paris, Los Angeles 2028 sonne enfin l’heure de la libération . Le CIO vient d’annoncer que la Vitesse, la Difficulté et le Bloc auront chacune leur podium dédié , avec autant de médailles pour les hommes que pour les femmes. Et franchement, ce n’était pas du luxe. © IFSC Tokyo 2020 : le combiné ou le « trois en un » forcé Petit retour en arrière : en 2020, l’entrée en scène olympique de l’escalade à Tokyo ressemblait à un drôle d’exercice imposé. Une seule épreuve pour trois disciplines, le fameux « combiné » : un peu comme si l’on demandait à un athlète de courir le 100 mètres, puis le 10 000 mètres, avant de conclure par un saut en hauteur. Spectaculaire, certes, mais absurde . Résultat : des athlètes comme Alberto Ginés López ou Janja Garnbret s’étaient imposés grâce à leur polyvalence extrême, plus qu’à leur spécialisation. On saluait l’exploit, mais avec ce goût amer d’avoir assisté à un spectacle où la véritable excellence était bridée par les compromis. Paris 2024 : un pas timide vers l’émancipation Quatre ans plus tard, à Paris, le CIO décidait de faire un premier pas vers une séparation tant attendue, en attribuant deux jeux de médailles  : un pour la Vitesse, indépendante désormais, et un autre pour un combiné réduit à la Difficulté et au Bloc. Moins improbable qu’à Tokyo, certes, mais toujours inconfortable. Ce semi-combiné parisien restera probablement dans les mémoires comme une transition nécessaire, mais insuffisante, laissant encore dans l’ombre des athlètes qui excellent sur une seule discipline, mais peinent à briller sur deux à la fois. Los Angeles 2028 : la fin du mariage forcé La cité du cinéma aime les scénarios clairs, nets et précis. À Los Angeles, pas question de continuer à brouiller les pistes. Le CIO a décidé que chaque discipline aurait enfin droit à son propre podium olympique . La nouvelle a fait l’effet d’un véritable soulagement pour toute la communauté de l’escalade. Le président de l’IFSC, Marco Scolaris, a salué cette décision en affirmant : « Depuis le début de notre aventure olympique, notre objectif était clair : trois disciplines, trois podiums. À Los Angeles, chacun pourra enfin découvrir leurs spécificités. »  Autrement dit, finies les combines douteuses. Chacun son jeu, chacun ses règles, chacun ses héros. Trois podiums, trois histoires différentes Concrètement, qu’est-ce qui change ? L’essentiel. L’escalade pourra enfin dévoiler clairement ses trois visages distincts : La Vitesse  : c’est l’épreuve la plus simple à saisir pour le grand public. Ici, pas de subtilité à outrance, seulement une course verticale effrénée contre la montre. Le sprint en chaussons , pure adrénaline, où le chrono règne en maître. La Difficulté (Lead)  : épreuve reine pour les puristes, où chaque mouvement est calculé, réfléchi, presque méditatif. Ici, les athlètes montent très haut, très longtemps, et chaque prise devient une réflexion en soi. Une lutte mentale autant que physique , digne d’un film d’auteur où chaque silence compte. Le Bloc (Boulder)  : la plus explosive des trois disciplines. Courts problèmes, haute intensité, mouvements radicaux. Entre stratégie pure et force brute , cette discipline impose un jeu d’échecs physique où chaque erreur peut coûter le podium. Trois disciplines, trois façons de raconter une histoire. Trois scènes séparées, pour trois spectacles différents. Plus d’athlètes, plus d’opportunités ? Le CIO en profite pour augmenter légèrement le quota d’athlètes : 38 femmes et 38 hommes , soit 76 places à répartir sur trois disciplines. Jusque-là, tout est clair. Mais côté détails, on nage encore en pleine zone grise : la répartition précise des places entre la Vitesse, la Difficulté et le Bloc sera finalisée ultérieurement dans le futur système de qualification olympique . Seule certitude, et elle n’est pas anodine : le CIO envisage ouvertement la possibilité pour certains athlètes de participer à plusieurs disciplines . Une nuance subtile mais capitale, qui ouvre la porte à toutes les combinaisons stratégiques possibles… et aux spéculations les plus savoureuses. En attendant ce fameux règlement, chacun pourra donc s'amuser à imaginer ses scénarios favoris. L’enjeu derrière cette séparation Avec ces trois podiums clairement distincts, l’escalade entre enfin dans une ère de lisibilité olympique totale. L’idée est simple : mieux mettre en lumière chaque spécialité, rendre le sport plus clair, plus accessible au grand public sans le dénaturer. Car soyons francs : à force de vouloir mélanger les styles, l’escalade olympique menaçait d’en perdre son identité profonde. Désormais, chaque discipline pourra pleinement exprimer ses qualités spécifiques  et attirer un public différent, offrant une visibilité accrue à la richesse de ce sport aux multiples facettes. Los Angeles : un tournant pour la grimpe olympique En attribuant trois podiums, le CIO offre enfin à l’escalade la chance d’écrire clairement sa propre histoire olympique, discipline par discipline. Après Tokyo, après Paris, Los Angeles pourrait bien être le vrai point de départ  d’une escalade olympique pleinement assumée, où les athlètes ne seront plus contraints à l’équilibrisme permanent entre polyvalence et spécialisation. Chacune des trois disciplines aura enfin droit à son heure de gloire. Rendez-vous donc pris pour un triple show olympique inédit  à Los Angeles, en 2028. C’est sans doute là, sur ces trois podiums enfin séparés, que l’escalade pourra véritablement conquérir le grand public. Et ce ne sera pas trop tôt.

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